Étude de la mobilité et des interactions de noyaux de population de cerfs élaphes sur des habitats proches et encadrés ou traversés par des infrastructures de transport.
Les départements du Doubs et de la Haute-Saône abritent cinq noyaux de population de Cerf élaphe Cervus elaphus, localisés entre Marchaux et Montbéliard dans le Doubs (zone de « Rougemont et alentours ») et dans les Vosges Saônoises en Haute-Saône (collines sous-vosgiennes, sud de Villersexel et zone centrale Lure). Ces noyaux de population sont limités et séparés par des infrastructures linéaires de transport (ILT) d’envergure : la LGV Rhin-Rhône, entre Haute-Saône et Doubs, et l’autoroute A36 au sud de la zone de présence du cerf, quasi-infranchissable et récemment équipée d’éco-ponts (2023).
Espèce présentant un intérêt indéniable sur le plan patrimonial, environnemental et cynégétique, la biologie du cerf est encore assez méconnue localement. Un suivi des effectifs de population est réalisé chaque année par les fédérations à travers la méthode de l’Indice nocturne (IN) : Indicateur de changement écologique validé scientifiquement pour suivre l’évolution démographique des populations (Chevrier et al., 2015). Une tendance à la hausse de l’IN sur les deux départements est ainsi observée depuis plusieurs années, couplée à une extension géographique des populations. Cependant, des discordances persistent entre résultats de suivis et observations des acteurs locaux, qui pourraient s’expliquer par des mouvements de population entre plusieurs noyaux sur une superficie d’environ 25 000 ha.
Afin de mieux comprendre les mouvements de populations et les interactions entre les différents noyaux, les FDC 25, FDC 70 et FRC BFC ont initié le projet REPARTCERFS en 2021. L’objectif de ce projet est d’étudier la répartition des noyaux de populations et leurs interactions, en lien avec les ILT présentes sur le territoire (LGV Rhin-Rhône et A36 principalement). Pour cela, le fléchage et l’équipement en colliers GPS de cerfs était prévu afin de suivre quotidiennement le déplacement des individus et analyser leur utilisation de l’espace. En parallèle, un suivi par piège photographique de différents ouvrages d’art sur les ILT devait permettre de confirmer ou non la franchissabilité de ces dernières.
Pour la première année, les FDC 25 et 70 ont choisi le type d’équipement (fléchage, colliers GPS, logiciel de suivi, pièges photographiques) et élaboré le protocole de suivi de cerfs en lien avec le réseau ongulés de l’OFB. Plusieurs équipements nécessaires au suivi ont été acquis (jumelles thermiques, fusils hypodermiques, flèches, produits anesthésiants, boucles, autres consommables pour les opérations de fléchage, colliers GPS, pièges photographiques) et les autorisations nécessaires au fléchage, équipement et relâcher des individus ont été obtenues. Des salariés ont été formés au tir et à la manipulation des individus, ainsi que quelques bénévoles à la manipulation des animaux en appui aux salariés de la FDC. Des échanges ont eu lieu avec les gestionnaires d’infrastructures (SNCF Réseau et APRR) et ont permis d’équiper six ouvrages de franchissement de la LGV avec des pièges photographiques. SNCF Réseau et APRR ont par ailleurs confirmer l’absence d’incidents de collision ou d’intrusion de cerfs dans leurs emprises.
La deuxième année du projet a permis de mettre en place les opérations de fléchage et d’équipement de cerfs et poursuivre le suivi par piège photographique des différents ouvrages de franchissement. Une synthèse des résultats obtenus est transmise chaque année à SNCF Réseau et APRR. Six cerfs ont été équipés et suivis, dont un retrouvé mort à la suite d’affrontements avec des mâles adultes lors du brame. Cinq ouvrages de franchissement ont été suivis, dont quatre avec passage de cerfs confirmés.
La troisième année du projet a permis la poursuite des différents suivis mis en place : deux nouveaux individus ont été équipés et un ouvrage supplémentaire a été suivi. En parallèle, les FDC 25 et 70 ont pu appliquer la méthodologie Via Fauna développée par la FRC Occitanie, permettant de modéliser les habitats préférentiels de la faune sauvage forestière ainsi que les Chemins de Moindre Coût représentant les zones les plus favorables au déplacement des espèces. Cette première approche a permis d’amorcer une réflexion propre au projet REPARTCERFS et de proposer une étude plus précise autour des ILT fragmentantes de la zone d’étude (LGV Rhin-Rhône et A36) lors de la dernière année du projet. L’espèce cerf sera ciblée et l’objectif sera d’analyser les secteurs de franchissement potentiels par le cerf, en lien avec le suivi par piège photographique mené sur certains ouvrages. Par ailleurs, des échanges ont eu lieu avec l’INRAe de Toulouse, notamment dans le cadre du projet Macervus mené en Occitanie par plusieurs FDC sur l’analyse des liens de parenté d’animaux grâce à des analyses génétiques. Suite à ces échanges, il a été décidé de mettre en place une analyse génétique des individus sur la zone d’étude par collecte de tissus musculaires. La collecte a été mise en place auprès des territoires de chasse et 165 échantillons ont été récoltés et seront analysés lors de la dernière année.
Ainsi, la dernière année du projet REPARTCERFS est en cours et doit permettre un bilan final des actions menées. Une analyse globale multicritères de l’ensemble des données devra être réalisée (colliers GPS, suivi par piège photographique des ouvrages de franchissement, analyse Via Fauna, résultats de l’analyse génétique), en croisant avec d’autres facteurs potentiels (peuplements forestiers, conditions météorologiques, pressions de chasse, etc.). Les résultats seront établis en concertation avec le réseau ongulés de l’OFB et l’INRAe et communiqués aux différents acteurs locaux (gestionnaires d’ILT, acteurs agricoles et forestiers).
Ce projet est financé par l’Office Français de la Biodiversité et la Fédération Nationale des Chasseurs dans le cadre de l’écocontribution.